Orientales del Sur. / Orientaux du Sud.

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En 1943, en su famoso cuadro "América Invertida", Joaquín Torres García ya sintió la necesidad de ubicar a su ciudad natal en un mapa con longitud y latitud. A pesar de sus esfuerzos, Montevideo se fue borrando poco a poco del mapa del mundo, después de haber sido, al principio del siglo XX, una escala importante en las famosas y concurridas líneas marítimas transatlánticas entre Europa y Sudamérica. Después de la Guerra Fría que le trajo su lote de dictadura y desaparecidos, Montevideo fue totalmente olvidada por el mundo. Atrapados entre un gigante brasileño demasiado diferente y una Argentina demasiado inestable, los montevideanos se fueron acostumbrando a su nueva inexistencia internacional y siguieron juntándose a tomar mate en Punta Gorda, a la hora de la puesta del sol sobre el horizonte del Río de la Plata.
En 1999, mi empresa porteña me encargó un estudio en la capital uruguaya. Durante casi un año, todos los lunes por la mañana tomaba el avión en Aeroparque (Buenos Aires) y aterrizaba media hora después en Carrasco (Montevideo). El viernes a la tarde, volvía a cruzar el Río de la Plata en sentido contrario.  Me alojaba en el hotel Lafayette cuyos empleados, después de un par de meses, me consideraron como un pariente. Las semanas con pocas reservas, que eran muchas, el recepcionista me dejaba la "suite presidencial". La cocinera me prepara una salsa personalizada para la pasta. El remisero que me buscaba y llevaba al aeropuerto se conocía toda mi vida, y yo la de él. No podría haberme sentido más cómodo. La capital oriental me resultaba totalmente familiar y los montevideanos me trataban como un vecino rioplatense. El hecho de estar viajando todas las semanas entre las dos ciudades me procuraba una sensación especial, la de estar suspendido en un estado a la vez temporario y permanente. No creo que vuelva nunca a Montevideo, pero me queda el recuerdo de este extraño paréntesis en mi vida, como un cuento de Mario Benedetti.


En 1943, sur son célèbre tableau "América Invertida", Joaquín Torres García a ressenti le besoin de situer sa ville natale sur une carte avec longitude et latitude. Malgré ses efforts, Montevideo s'est progressivement effacée de la carte du monde après avoir été au début du XXe siècle, une escale majeure sur les fameuses routes maritimes transatlantiques entre l'Europe et l'Amérique du Sud. Après la Guerre Froide, qui lui a apporté sa part de dictature et de disparus, Montevideo a été totalement oubliée par le monde. Coincée entre un géant brésilien trop différent et une Argentine trop instable, les Montevidéens se sont habitués à leur nouvelle inexistence internationale et ont continué à se réunir pour boire le maté à Punta Gorda, au coucher du soleil sur l'horizon du Rio de la Plata.
En 1999, mon entreprise portègne m'a chargé d'une étude dans la capitale uruguayenne. Pendant presque un an, tous les lundis matin je prenais l'avion à Aeroparque (Buenos Aires) et une demi-heure plus tard j'atterrissais à Carrasco (Montevideo). Le vendredi soir, je retraversais le Rio de la Plata dans le sens contraire. Je logeais à l'Hôtel Lafayette dont les employés, au bout de quelques mois, m'ont considéré comme un parent. Les semaines de peu de réservations, qui étaient nombreuses, le réceptionniste me laissait la "suite présidentielle". La cuisinière me préparait une sauce personnalisée pour les pâtes. Le chauffeur de taxi qui m'emmenait à l'aéroport connaissait toute ma vie et moi la sienne. Je ne pourrais pas m'être senti plus à mon aise. La capitale orientale m'était totalement familière et les Montevidéens me traitaient comme un voisin Rioplatense. Le fait de voyager chaque semaine entre les deux villes me procurait un sentiment particulier d'être suspendu dans un état à la fois temporaire et permanent. Je ne pense pas que je retourne un jour à Montevideo, mais je garde le souvenir de cette parenthèse étrange dans ma vie, comme une nouvelle de Mario Benedetti.


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