Casablanca: l'authenticité du mythe. /Casablanca: autenticidad del mito.


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Son nom évoque l’éclat blanc d’une ville noyée entre le bleu outremer et l’azur, une image lointaine inondée de soleil aperçue depuis le pont d’un bateau faisant cap vers son port. En 2005, ce nom m'a permis de rêver à nouveau et m’a fait accepter immédiatement le poste qu’on me proposait dans cette ville dont je ne savais rien. C'est ainsi que je m'installais au cinquième étage du siège de la société situé en plein centre, tout proche du port. Entouré d’immeubles néo-mauresques, ma vie retrouvait enfin une esthétique après avoir survécu un an à l'abomination urbanistique des alentours de Nanterre.
Invention française du tout début du XXème siècle, c’est ce port constituant une escale sur les routes maritimes entre l’Europe à l’Amérique du Sud qui draine depuis lors des hommes et des femmes à la recherche de travail, de négoces voire d’aventure et de fortune. Aujourd’hui encore des dizaines d’immigrants européens y débarquent tous les ans pour se faire embaucher comme comptables, architectes ou ingénieurs. Cette population cosmopolite en fait une cité de culture différente, difficilement domestiquée par les autorités nationales. De la misère des bidon-villes au luxe caché d'Anfa, de la classe moyenne du Maârif aux nouveaux riches de Californie la ségrégation sociale est impitoyable, mais elle n'est pas ethnique ni religieuse ni culturelle et ses habitants marocains et européens se côtoient et évoluent dans les mêmes espaces.
Par chance, grâce à sa mauvaise réputation, son intense trafic et sa pollution, elle est soigneusement évitée par les agences de voyage, ce qui en fait la seule ville du royaume dont les avenues ne sont pas enlaidies d'un torrent continu de touristes et de guides. On ne s'y promène donc ni en short ni en chameau, ce qui préserve la dignité urbaine de ses artères élégantes.
Pensée et planifiée par des urbanistes et des paysagistes, enrichie par des architectes d'avant-garde financés par de riches commanditaires privés avides d'ostentation, avantagée par ses infrastructures portuaires imposantes, couronnée par le dernier monument alaouite, Casablanca a une classe intrinsèque que des décennies de mauvais goût mondialisé ne parviendront pas à faire disparaître.
Cette ville (où je m’enorgueillis d'avoir vécu cinq ans) est restée à la hauteur de son passé mythique. Le mythe n'a pas été vendu en pâture ni disneylandisé pour le plus petit dénominateur commun, car Casablanca n'a rien à vendre sur le marché mondial du tourisme in vitro. Mais elle se suffit à elle-même, continue de croitre et les riches Casablancais roulent toujours en Jaguar dans les rues sales et sur les routes poussiéreuses du pays et suscitent l'indignation des touristes venus apporter des stylos Bic dans les pays "du Sud".

Su nombre evoca el resplandor blanco de una ciudad diluida entre el azul ultramar y el celeste, una imagen distante bañada por el sol, distinguida desde la cubierta de un barco con rumbo a su puerto. Ese nombre me permitió volver a soñar y me hizo aceptar inmediatamente el puesto que me ofrecían en esa ciudad de la cual no sabía nada. Fue así que en el 2005 me instalaba en el quinto piso de la sede de la empresa ubicada en el centro, muy cerca del puerto. Rodeado por edificios de estilo neo-morisco, mi vida retomaba por fin una estética después de un año de supervivencia en la abominación urbana de los suburbios parisinos.
Invención francesa del inicio del siglo XX, es ese puerto, escala en las rutas marítimas entre Europa y Sudamérica que drena desde entonces hacia ella hombres y mujeres en busca de trabajo, negocio, aventura y fortuna sin interrupción. Todavía hoy, decenas de inmigrantes europeos desembarcan allí cada año para ser contratados como contadores, arquitectos o ingenieros. Esta población cosmopolita hace de ella una ciudad de cultura diferente, difícilmente domesticada por las autoridades nacionales. Desde la miseria de los barrios pobres al lujo escondido de Anfa, de la clase media del Maârif a los nuevos ricos de California la segregación social es implacable, pero no es étnica ni religiosa ni cultural y los habitantes marroquíes y europeos conviven en los mismos espacios.
Afortunadamente, gracias a su mala reputación, su tráfico intenso y su contaminación, es cuidadosamente evitada por las agencias de viaje por lo que es la única ciudad del reino cuyas avenidas no están desfiguradas por un flujo continuo de turistas y guías. Así que nadie pasea en pantalones cortos ni en camello, lo que preserva la dignidad urbana de sus arterias elegantes.
Pensada y planificada por urbanistas y paisajistas, enriquecida por arquitectos de vanguardia financiados por ricos patrocinadores privados deseosos de ostentación, favorecida por sus infraestructuras portuarias imponentes, coronada por el último monumento alauí, Casablanca tiene un elegancia intrínseca que décadas de mal gusto globalizado no lograrán borrar.

Esta ciudad (en la que me enorgullece haber vivido cinco años) se mantiene todavía a la altura de su pasado mítico. El mito no fue vendido o disneylandizado para el mínimo común denominador porque Casablanca no tiene nada para vender en el mercado mundial del turismo in-vitro. Pero no necesita venderse, sigue creciendo y los ricos Casablanquenses siguen manejando su Jaguar en las calles sucias y las carreteras polvorientas del país despertando la indignación de los turistas que llevan bolígrafos Bic a los países "del Sur".

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